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Martin Fourcade | « Par passion avant tout »

Martin Fourcade « Par passion avant tout »

Numéro 96

Trois titres de champion du monde, un gros globe de cristal et deux petits au palmarès pour l’hiver dernier… A part ça, Martin Fourcade est un vrai passionné qui expose le plus simplement du monde ses objectifs. Rencontre avec le meilleur biathlète de France et de Navarre, à l’aube d’une nouvelle saison où on peut lui faire confiance pour défendre chèrement ses titres.

 

Nous l’avons interviewé dans l’automne, juste avant son départ pour la Norvège le 2 novembre. Le « coincer » après, alors qu’il restait en Scandinavie jusqu’au 16 décembre, aurait été mission quasi impossible vu le planning qui l’attendait ! Jugez plutôt…

Le 16 novembre à Beitostolen, à l’issue de sept mois de préparation intense, fin prêt pour son nouveau challenge, Martin se qualifie pour l’ouverture de la coupe du monde de ski de fond à Gällivare. Légitimement fier de sa sixième place (2e Français, derrière Manificat et devant Gaillard) qui lui permet de valider son billet pour cette nouvelle aventure. A peine le temps de savourer l’instant qu’il s’élance le lendemain dans le premier sprint biathlon de l’hiver. Remporté avec 38 secondes d’avance. Même si ce n’est pas une coupe du monde, ça met en confiance pour la suite. Une semaine plus tard, le 24 novembre, Martin repose la carabine pour prendre le départ du 15 km libre fond à Gällivare. 48e. « Une bonne branlée pour commencer », résume-t-il sobrement, mais non sans humour, sur sa page facebook… C’est clair, ça calme (ou plutôt, ça énerve), mais Martin se recentre fissa sur l’ouverture de la coupe du monde de biathlon à Östersund (Suède) qui se déroule quatre jours plus tard. Numéro 1 il est, numéro 1 il compte rester… avec un 19/20 au tir, il franchit la ligne d’arrivée en vainqueur, signant son quinzième succès en coupe du monde. La suite ? « Le meilleur reste à venir », a-t-on envie de lui prédire !

 

Championnats du monde de Ruhpolding, 11 mars 2012. Déjà sacré en sprint et en poursuite, Martin remporte la mass-start et égale le palmarès de Raphaël Poirée (2004) et Ole Einar Bjoerndalen (2005) avec trois titres mondiaux décrochés dans la même édition.Traces : Tu as terminé la saison 2011/2012 en apothéose, ensuite tu as été très actif au niveau de ta préparation physique. Tu dois aborder l’hiver en confiance, mais avec aussi un peu plus de pression par rapport aux nouveaux objectifs que tu t’es fixés ?

Martin Fourcade : Ce n’est pas tant une pression extérieure qu’intérieure : la pression, je me la mets tout seul en fin de compte, car j’ai envie de bien faire et de réussir ! Je ne me sens pas dans l’obligation de faire quelque chose parce que j’ai réussi ma saison l’an dernier. C’est moi qui me fixe mes objectifs, et je ne suis pas inquiet par rapport à cela…

 

Effet champion du monde oblige, tu es très sollicité depuis ce printemps. Arrives-tu à tout concilier ?

C’est vrai que j’ai plus de sollicitations et de demandes, et je prends sur mon temps personnel pour y répondre. C’est du temps de repos en moins forcément, mais il est important de faire parler de notre sport, donc c’est quelque chose que je fais avec plaisir, en fixant toutefois les priorités…

 

Dans ta préparation physique cet été, sur quels domaines t’es-tu surtout concentré ?

Nous avons suivi un programme de préparation sensiblement équivalent à celui de l’été dernier, qui avait bien marché. Nous sommes partis en Norvège, en Autriche, en Allemagne, et les deux gros points sur lesquels j’ai travaillé sont le tir – je pense que j’ai progressé sur le tir couché – et ma condition physique.

 

En biathlon, quelles sont tes priorités cette année ?

L’objectif le plus important, c’est de rester champion du monde. Les Mondiaux se dérouleront en février à Nove Mesto en République tchèque. Ensuite, ce sera le classement de la coupe du monde au général.

 

Et concernant le ski de fond ?

Etant plus jeune, j’ai fait les deux disciplines, j’ai passé de bons moments et il est intéressant de pouvoir allier les deux. Décrocher ma sélection pour la première étape de la coupe du monde de ski de fond est mon objectif de l’hiver. Il est vrai que les Mondiaux en février pourraient m’intéresser, mais je suis avant tout biathlète, et mes objectifs principaux restent fixés pour le moment sur ma discipline.

 

Quelles étapes de la coupe du monde affectionnes-tu ?

J’aime particulièrement l’ambiance d’Antholz-Anterselva en Italie. C’est un site exceptionnel où on a toujours un temps magnifique. J’ai aussi un petit faible pour Östersund, en Suède, qui marque chaque année l’ouverture de la coupe du monde. C’est un endroit qui me réussit plutôt bien, et je vais essayer de faire en sorte que ça continue ! (Martin y a remporté sa troisième victoire le 27 novembre dernier en individuel, après s’être imposé sur la poursuite et l’individuel l’an passé, ndlr).

 

Plus jeune, quels sont les biathlètes qui t’ont inspiré ?

Des champions comme Raphaël Poirée ou Bjoerndalen m’ont fait rêver. Maintenant, j’essaye de faire ma route et de me forger tout seul (rires).

 

Championnats du monde de Ruhpolding, 11 mars 2012. Vingt-quatre heures après l’or du sprint, l’or de la poursuite se trouve juste derrière la ligne d’arrivée… où l’attend Simon, son frère, 6e de l’épreuve.Tes résultats sportifs, et aussi ceux de l’équipe de France depuis de nombreuses années, contribuent à la médiatisation du biathlon. Au-delà de tes performances, essayes-tu de promouvoir ton sport d’une manière ou d’une autre ?

J’essaye de le faire dès que j’en ai l’occasion. Nous avons tourné cet été, avec le réalisateur Guillaume Pivot, un film de 52 minutes qui retrace ma préparation estivale pour montrer au grand public le quotidien d’un biathlète de haut niveau. Ce sont des initiatives comme celles-là, ajoutées les unes aux autres, qui font que l’on parle de plus en plus du biathlon et qui peuvent donner envie aux plus jeunes de venir à la pratique.

 

Comment aimerais-tu voir évoluer ta discipline ?

Personnellement, je suis très satisfait du biathlon à l’heure actuelle, que ce soit au niveau des formats de compétition ou de notre fédération (l’IBU, ndlr). Médiatiquement, je pense que notre sport procure un beau spectacle avec des courses intéressantes et très télégéniques. Il devrait évoluer dans ce sens-là pour attirer davantage la télévision et, sans devenir un sport de masse, devenir un sport regardé.

 

L’ESF vient de mettre en place une progression et des tests de performance biathlon, et a fait de cette discipline son fer de lance pour relancer les disciplines nordiques. Quel regard portes-tu sur cette initiative ?

C’est une idée que je trouve très intéressante puisqu’elle devrait permettre de démocratiser la pratique. Jusqu’à présent, il était difficile pour les personnes qui nous regardaient de s’initier au biathlon. J’en avais parlé avec Gilles Chabert, le président du Syndicat des moniteurs, et aussi le directeur de l’ESF de Font-Romeu, qui m’avaient exposé ce projet. Cette initiative permettra aussi à l’ESF de compléter son offre ; donc finalement, tout le monde s’y retrouvera. C’est un réel plus pour notre discipline, il faudra suivre avec attention l’évolution de ce nouveau produit.

 

Tu as assisté aux JO de Londres cet été. Cela t’a aidé à te projeter pour les JO de 2014 ?

Bien sûr ! J’ai notamment assisté à la finale du 100 mètres. L’esprit olympique, c’est une ambiance à part. Cela fait déjà quatre ans que nous avons créé un plan de carrière sur les Jeux de Sotchi… Les JO de Vancouver en 2010 sont restés un moment fort dans ma carrière (vice-champion olympique de mass-start, ndlr) et j’espère encore faire mieux à Sotchi !

 

Fais-tu aussi du ski alpin ?

J’en ai fait, mais j’ai toujours été moins attiré par la vitesse que par l’endurance et le dépassement de soi. J’aime me dépenser et ne pas avoir de moments d’attente, tout cela fait que j’ai choisi le biathlon. C’est un sport que je continue à faire par passion avant tout.

 

* Compteurs à zéro, tourné d’avril à novembre 2012, jusqu’au 15 km de Beitostolen où Martin a décroché sa sélection pour l’ouverture de la coupe du monde de ski de fond. Diffusé sur Eurosport les 23, 24, 25, 28, 29 novembre, et disponible sur martinfourcade-lefilm.fr depuis le 1er décembre.

 

 Martin Fourcade en bref 

Itinéraire

• 24 ans.

• Entre en équipe de France à 16 ans.

Palmarès

• Mondiaux 2012 : champion du monde de sprint, poursuite et mass-start, vice-champion du monde de relais.

• Coupe du monde 2012 : vainqueur du classement général, globes de cristal en sprint et poursuite.

• 2011 : champion du monde de poursuite, médaillé de bronze en relais, 3e au classement général de la coupe du monde.

• 2010 : vice-champion olympique de mass-start, globe de cristal en poursuite.

• 41 podiums (32 podiums en individuel, dont 15 victoires).

Plus d’infos

• Site web : martinfourcade.fr

• page facebook : Martin Fourcade

 

Propos recueillis par Anne Nguyen-Carrier

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